Alors que les conflits entre Prosopée et Syllabe s’intensifiaient, un groupe de rebelle des profondeurs prirent d’assaut un véhicule de voyage. À bord de celui-ci se trouvait une femme, d’une beauté qui aurait fait que les tournesols se tournent vers elle plutôt que vers le soleil.
Les bandits la kidnappèrent et plus jamais ne revut-elle la lueur du jour.
Perdue dans les dédales de Prosopée, on abusa d’elle. On la martyrisa. Elle était une esclave, un trophée de chasse, une vengeance contre les gens d’en-haut.
Les violences qu’elle reçut n’étaient rien face à celles que sa descendance allait connaître.
Car oui, elle avait été mise enceinte par le chef de ses ravisseurs.
Elle donna vie à un petit être métissé, à la peau légèrement halée, doté de petits bouts de cornes.
Celui-ci avait été recueilli par son père biologique.
Au début, tout semblait aller bien pour lui, on le formait à l’assassinat et au vandalisme.
Mais lorsqu’il était alors un jeune adolescent, il tenta de fuguer, de fuir de sa prison souterraine… Chose qu’il accomplit, et dont il profita pour faire son pèlerinage.
Il embarqua dans une voiture hippomobile.
On pensait qu’il était en retard pour la recherche de sa pierre. C’était un tel honneur que d’en trouver une, on ne pouvait que l’aider à y aller…
Mais quel honneur a-t-on à mentir ?
Ce garçon n’aurait jamais pu accéder à cette quête sans fourcher sa langue. Son insolence allait le tuer en plein vol.
Mais sa soif de puissance, d’inconnu était si forte qu’il cherchait ardemment…
Et il trouva.
Sa pierre était une kunzite.
En la tenant entre ses mains frêles, il obtenu le pouvoir de manipuler l’étincelle de vie des êtres vivants, à un degré très réduit.
Ainsi, il pourrait rajeunir à volonté, défier la mort en l’empêchant de réclamer une âme...
Malheureusement, il utilisait ce pouvoir à des desseins plus sombres. Faire faner une fleur lui prenait quelques minutes, un chat quelques jours. Pour un humain… C’était plus délicat, et le processus bien plus long. Et douloureux, pour la victime comme pour le bourreau.
D’autant plus qu’une flamme consumée ne peut plus être ignifiée à nouveau, et ainsi la force vitale épuisée d’un corps s’en échappe, insaisissable pour l’enfant.
Pour le punir de s’en être allé, et ce jusqu’à sa majorité, on en fit un jaal et on brisa sa pierre.
On enchérissait les prix.
Une telle beauté androgyne, cela attirait. Ses cornes ? De nombreux syllabiens fétichistes les adoraient.
Sa vie était un enfer, il avait connu les peines et les violences les plus cruelles que l’on puisse infliger.
Mais son existence pitoyable prit un tournant lorsqu’une bande de pirates descendit dans les galeries.
Entrant de force dans la maison close qui le renfermait, les boucaniers firent un massacre, ouvrant la porte des enfers aux bandits, clients, et jaals qu’ils trouvèrent.
Leur capitaine, un syllabien féroce, fouillait l’arrière-salle, en cherchant d’éventuels survivants.
Il y fit une découverte incroyable : une personne au physique à la fois féminin et masculin. Des cheveux d’or. Parée de vêtements légers qui laissaient entrevoir son corps. Il s’agissait de Hooligan.
Le coeur du pirate battait tel un orchestre dans sa poitrine.
Ce jaal-ci allait survivre. Il allait vivre. Il allait connaître l’extérieur.
Grâce aux gênes de sa mère, il avait pu apercevoir le jour pour la première fois, n’ayant connu que la nuit afin de ne pas devenir aveugle.
Et c’est ainsi qu’il fut marié, de force bien sûr, au corsaire qui l’avait délivré. Le voici aux côtés d’un terrifiant pilleur de villages et voleur de trésors, redouté pour sa flotte de bateaux gigantesque, capable d’envahir Prosodie en quelques heures s’il le fallait.
Ce pouvoir, toutes ces perles, et ces pierres…
Le luxe d’être marié au capitaine monta très vite à la tête de Hooligan.
C’est là qu’il eut son quart d’heure de gloire… en poussant l’équipage à la mutinerie !
Ainsi, son époux hurlant de douleur jusqu’à ce que mort s’en suive, il se vit devenir terreur des mers.
Roi-pirate autoproclamé, il établit un code strict à bord de sa flotte, rétablissant l’honneur et la tenue : le viol était puni par la décapitation ; les relations sexuelles étant interdites, quiconque était surpris se voyait émasculé ou marcher sur la planche ; la fidélité d’une bourgade lui valait une protection par les pirates et la promesse de ne plus être pillée par ceux-ci ; et s’en suivent…
La vie était tranquille lorsque l’on était à la tête de tout ce monde.
On vivait de rhum, d’eau fraîche. Contrairement aux attentes, Hooligan était resté un jaal. Un jaal de luxe. Les plus riches hommes se battaient pour pouvoir monter à bord de son navire et connaître les joies charnelles en plein océan à ses côtés...
Quant au karma, celui-ci frappa le premier.
Et son premier coup, c’était une tempête.
La mer se déchaînait contre la coque des navires, les coulant un par un.
Les pièces d’or qui sombrent,
Les crânes qui s'inondent,
Les bateau qui se percent,
Le capitaine qui s’effondre.
La flotte fut entièrement décimée, par pure malchance.
Hooligan survécu, naufragé sur le continent principal. Il s'assura pendant deux longs jours que personne d’autre n’allait quitter les restes de navires, exécutant quiconque sortait de l’eau, même si l’utilisation de ses pouvoirs le vidait de sa propre énergie...
L’honneur passait outre, lorsque la confiance ne régnait pas.
Le voici seul, perdu.
Toute sa grandeur, envolé. Tout son or, dérobé.
Ses aventures de pirate n’allaient pas se terminer de sitôt !
Il fallait se relever, et avancer. Voler, et encaisser.